La tombe du plongeur à Paestum
Il est des lieux auxquels on rêve depuis longtemps. Pour moi, l’un de ces lieux était Paestum. J’ai désormais la joie d’avoir pu y aller …
C’est à Paestum que se trouvent les temples les plus importants du monde grec. En effet, au VIème et Vème siècle BC, le site, alors appelé Poseidonia car dédié au dieu de la Mer, faisait partie de la Grande Grèce. Les Grecs avaient besoin de matériaux, comme le fer, et de produits agricoles dont ils ne disposaient pas ou ne pouvaient pas cultiver sur leurs terres. C’est donc le commerce et les échanges qui permirent cette expansion à travers le bassin méditerranéen, comme ici à Paestum, terre hautement agricole aujourd’hui dans la région de Naples en Italie.
Le temple le plus important est celui de Neptune — nom romain de Poséidon — ou d’Héra, on ne sait pas vraiment encore. Il est achevé dans le plus beau style dorique et ne comporte aucune sculpture architecturale. Mais au vu de sa grande beauté, nous reconnaîtrons que ce n’est pas bien grave.
Après vous êtes extasié (vraiment) devant ce temple, vous pouvez vous rendre au Musée Archéologique du site où est conservée une des plus belles œuvres qu’il m’ait été donné de voir : La tombe du plongeur. Ce sont des peintures retrouvées sur les cinq parois intérieures d’un sarcophage en pierre datant du Vème siècle BC. Ce sont les plus anciennes peintures du monde grec et parmi les plus importantes. La paroi intérieure du couvercle du sarcophage nous montre un plongeur nu s’élançant dans le vide. Le sujet est allégorique et représente probablement la plongée dans l’au-delà. La scène est d’une grande simplicité et c’est ce qui en fait sa force et sa beauté. Il n’y a que quelques détails ornementaux autour de lui ainsi qu’une référence très stylisée au plongeoir et à l’eau. Les autres parois représentent des scènes de banquet dans lesquelles l’érotisme est très clairement indiqué. Les convives sont exclusivement des hommes, deux d’entre eux se caressent le visage, deux autres pratiquent le jeu des coupes de vin : les hommes jouaient à s’envoyer du vin dans les coupes pour inviter le destinataire à partager leur couche.
Elles ont été mises à jour en 1968. Le site de Paestum étant resté vierge de constructions, les fouilles ont pu être réalisées de manière assez idéale. Il est fascinant de noter que cette tombe, dont l’occupant était certainement un personnage puissant de la cité, démontre aussi l’acculturation des peuples conquis par les Grecs : les parois intérieures du sarcophage sont peintes, ce qui est plutôt caractéristique des Lucaniens, habitants originels du lieu ; les peintures, elles, sont typiquement grecques : idéalisation du corps — vous noterez les tablettes de chocolat sur les abdominaux des convives qui révèlent la connaissance par les Grecs de l’anatomie humaine (dissection ?) — scènes de banquet, très importante dans le monde grec ; consommation du vin durant les symposium, ces moments de réunion durant lesquelles on sert peu de nourriture mais beaucoup de vin ; réunion exclusivement masculine, apanage des élites grecques…
Si vous avez l’occasion d’aller à Naples prochainement, poussez la balade jusque Paestum. Il y a un peu de route mais la vision à l’arrivée vaut largement les quelques kilomètres à parcourir…
Reconstitution de la disposition des peintures à l’intérieur du sarcophage